De l’urgence de la Réforme du Secteur de la Sécurité du Sénégal : une présentation succincte de politiques et d’actions à réaliser

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Introduction

Dans le programme de beaucoup de leaders politiques candidats aux élections présidentielles de cette année figure bien la réforme des institutions du Sénégal visant à réduire les pouvoirs du président de la république en particulier.  C’est même devenu une demande sociale. Il faudrait cependant inclure dans ce projet  le secteur de la sécurité d’autant plus que le président est le chef des armées et par le biais de son ministre de l’intérieur, il commande les forces de l’ordre que sont principalement la police et la gendarmerie.

En fait, une réforme du secteur de la sécurité n’a jamais été conduite dans notre pays où nous nous sommes toujours contentés d’améliorations constantes tant du point de vue de l’organisation, de la répartition des pouvoirs que de l’acquisition des matériels

Cette réforme globale nécessaire démarrant au niveau du président de la république devra entre autres  prendre plus en compte l’assemblée nationale, permettre de réaménager l’organisation du lourd  Ministère de l’intérieur, de renforcer le ministère des forces armées et de mieux répartir les pouvoirs entre les grands chefs de l’Armée. Enfin elle invitera à des politiques majeures visant à renforcer les capacités des FDS. Ce sera ainsi une rupture, une innovation majeure attendue depuis fort longtemps et qui pourra être considérée comme la première grande réforme intervenue dans les Forces Armées depuis  la réorganisation et la répartition des pouvoirs  formalisées par les lois70-23 du 06 juin 1970, 72-42  du 12.06.1972,  72-92 du 29.11.1972 et 84-62 du 16.08.1984

  1. Au niveau du PR et par rapport aux FDS, il s’agira de limiter ses pouvoirs de nomination et de destitution. Ainsi, encadrées par un texte de loi à produire, les nominations pour la fonction de chef des Armées, de la Gendarmerie, de la Police et du sommet du renseignement doivent être soumises à l’Assemblée nationale ; de même que d’autres fonctions de sécurité à préciser.
  2. Au niveau de l’Assemblée Nationale, il s’agira aussi entre autre de voter tous les 05 ans ou plus une Loi d’Orientation et de Programmation Militaire ( pour l’Armée)  et une LOPS ( Loi d’Orientation et de Programmation Sécuritaire ( pour les Forces de sécurité) qui fixent les recrutements, les formations et l’acquisition des matériels belliqueux ; ceci permettra d’éviter ces acquisitions hasardeuses et douteuses de matériels dont cette faramineuse somme pour des drones  et ces scandales dont la nébuleuse acquisition d’armes par le ministère de l’environnement.

L’Assemblée doit aussi s’arroger le droit de convoquer directement de hautes autorités militaires.

 

  1. Au niveau du Ministère des Forces Armées amputé de la gendarmerie migrant pour emploi au niveau du nouveau ministère de la sécurité, il faudra créer des organes qui lui permettent de se mettre plus à niveau comme instance de supervision des Armées. Il faudrait en urgence lui adjoindre un Haut Conseil de la Fonction Militaire, organe de concertation qui manque tant  et qui permettra de  mieux apporter des solutions aux problématiques liées à la condition militaire.

 

  1. Au niveau de l’Armée, autant tout le monde s’accorde sur la nécessité de réduire les pouvoirs du PR, autant il est temps de mettre les 03 chefs d’état-major d’armée au niveau mérité et appliqué dans les Armées modernes. Ainsi , la nomination de ces  03 grands chefs ( Terre , Air et Mer) ne devrait plus être laissée à l’appréciation d’une seule personne mais encadrée par un texte qui leur octroie en même temps une belle liberté d’action dans tous les domaines, le CEMGA étant plus chargé de la coordination des Armées entre autres missions et prérogatives.
  2. Le Ministère de l’intérieur actuel devra être scindé en 02 entités dès le prochain gouvernement :
  • Un Ministère de l’intérieur chargé de l’administration territoriale, de la décentralisation, des affaires sociales, religieuses, des élections etc.
  • Un Ministère de la Sécurité Intérieure regroupant la Gendarmerie pour emploi vu que l’essentiel de ses misions est consacré à la police administrative et judiciaire, la Police, la Protection civile, la sécurité de proximité  et le renseignement ; chaque corps conservant  son statut militaire ou civil.  Cependant l’intégration totale ou partielle de la gendarmerie  dans ce nouveau ministère nécessitera  la modification de la loi 84-62 du  16 Aout 1984 portant organisation des Forces Armées et si besoin n’était des lois 70-23 du 06 juin 1970 et 72-42 du 12 juin 1972 portant sur la défense nationale.
  1. Entre autres politiques  à conduire et actions concretes

Création d’une véritable réserve par :

  • – des stages d’officiers de réserve de 06 mois au plus pour disposer de plus de cadres employés dans le monde civil et prêts à répondre à l’appel pour la défense de la nation.
  • –  Une formation militaire  de 03 mois ou plus  pour les grands corps de l’état comme l’ENA, la Douane, etc. ou carrément leur faire suivre la formation d’officier de réserve avant d’intégrer leurs écoles respectives
  • –   Un service militaire court de 06 à 12 mois pour des volontaires avec un programme différent de ceux appelés à continuer à servir dans l’Armée de manière à renforcer la réserve de défense et l’esprit citoyen. Cette réserve indispensable en temps de crise  manque tant aux pays du sahel engagés dans la lutte contre des insurgés.

–  Des dispositions attractives pour  inviter des cadres à quitter les FDS pour se réinsérer dans le monde civil, ce qui renforcera les capacités de la réserve nationale et l’esprit citoyen

– La création  d’un commandement de la réserve à l’instar de certains pays doté d’un système de sécurité doté d’une réserve efficace.

Une politique de développement du contrôle de la violence au profit des forces de l’ordre qui lors des derniers événements ont montré un manque de maitrise causé par plusieurs facteurs

–  Une politique de lutte contre la corruption visant à renforcer les forces de l’ordre et à les réconcilier plus avec les populations..

 

Conclusion

Le développement du système de sécurité du Sénégal  exige pour une fois une réforme approfondie appliquée à tous les niveaux grâce à un concept pensé par des consultants nationaux expérimentés et libres de pensée, soutenus au besoin par d’autres experts africains.

Beaucoup d’actions devront être menées et qui figureront dans un document global de RSS rédigé à cet effet avec une approche globale. Il s’agira ainsi de mettre sur pied  une commission RSS réduite qui soumettra ses conclusions dans un délai raisonnable pour pouvoir aborder tous les domaines.

 

 Dakar le 30 Mars 2024

Par le Colonel Parachutiste (Er) Seyni Cissé DIOP

Consultant expert en Défense & Sécurité

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